Artiste : Le Tigre
Origine : NYC – Riot Grrrrl
Date de sortie : 1999
Genre : Electropunk féministe
Attention, ce disque n’est pas à mettre entre toutes les mains.
Déjà parce qu’à l’écoute de cet album vous viendra irrésistiblement l’envie de sauter partout, de lancer une émeute, de piétiner les gestes barrière à coups de Doc Martens multicolores et de bambocher comme aux dernières heures de Caligula.
Ensuite parce que le chant de Kathleen Hanna est aussi clivant que ses engagements politiques. Les vrai.e.s adoreront, d’autres détesteront. Figure de premier plan du « Riot Grrrrl » – scène punk féministe radicale née dans les années 90 entre New York et Portland – et ayant déjà à son actif une ribambelle de projets dont notamment Bikini Kill, Kathleen n’en est pas à son coup d’essai quand elle fonde Le Tigre en 1998. Pas forcément besoin d’adhérer au message pour adhérer à la musique dans ce cas, mais les deux sont tellement imbriqués qu’on ne peut le passer sous silence.
La voix haut perchée de Kathleen est clivante parce qu’elle sait certes chanter, mais elle sait aussi piailler, brailler, te gueuler à la tronche comme une adolescente hargneuse et remontée à bloc par la colère propre aux militantes. Dès la chanson d’ouverture Deceptacon – dont vous avez peut-être entendu l’air subreptiscement placé au détour d’un spot de pub télévisé – l’adrénaline monte.
Who took the bomp from the bompalompalomp ?
Who took the Ram from the Ramalama ding-dong ?
Et c’est parti pour sauter sur les tables en braillant dans une brosse à cheveux, une bouteille vide ou n’importe quoi qui tombe sous la main pour faire office de micro de fortune. De la pochette aux instrumentations, Le Tigre est imprégné d’un ethos punk et DIY palpable, c’est rugueux et amateur et bigrement énergique. Ce n’est pourtant pas le genre de CD de punk monomode qui se termine en 15 minutes, c’est plutôt le genre qui t’accompagne sur l’ensemble de la soirée ; aussi bien les moments déchaînés que les moments chill à refaire le monde dans un squat avec 3 grammes à chaque oeil.
Tous les titres sont efficaces et l’ADN electro-pop permet au groupe de s’autoriser des rythmiques plus variées que du touka touka (What’s Yr Take on Cassavetes, Friendship Station, Phanta) ou des interludes plus ‘chill’ (Eau d’Bedroom Dancing, Slideshow At the Free University) entre les titres punk acidulés carrément plus rentre-dedans (Deceptacon, My My Metrocard, The The Empty).
Pas besoin de s’étaler sur une longue chronique, écoutez cet album qui est compact, inventif, pétillant, acidulé et efficace. Un skeud devenu iconique de ce style et de cette scène féministe, et un classique de la bamboche de manière générale. Alors pour celles et ceux que la voix criarde n’a pas découragés, poussez les tables et mettez-vous une enjaillade comme si on était encore avant 2020.