Mi-septembre, voilà la rentrée bien entamée, et après une longue pause estivale à écouter des trucs, on vous propose une très succincte sélection d’albums qui nous ont accompagné depuis le mois de juin. On a essayé de varier les plaisirs, entre le Black Metal raffiné de Vile Haint, la Dark Pop sulfureuse de Zola Jesus, le Noise Rock de schlag de Chat Pile ou le bon gros Grind de Wake.
On espère que ça vous plaira !
Pour les plus pressés, voici les playlists Spotify et Yotuube :
Pencey Sloe – Neglect
Shoegaze / Dream Pop – France
Avec leur second album, le jeune duo parisien confirme qu’ils sont bien parmi les groupes à suivre de près dans le monde de la Shoegaze. Une pandémie après Don’t Believe, Watch Out, ils reviennent avec un son plus raffiné et plus intime. Les guitares se font plus rêveuses, et l’atmosphère gagne en subtilité reflétant les tourments, les interrogations et les espoirs de sa fondatrice Diane Pellotieri ; le projet a franchi un vrai pas de maturité avec Neglect.
Mais ne prenez pas notre parole comme évangile, écoutez plutôt l’album, et le fait que des prophètes comme Neige (Alcest) ou J.K. Broadrick (Godflesh, Jesu etc) sont en guest sur le diptyque The Run.
Chat Pile – God’s Country
Noise Rock / Sludge / Hardcore, USA
L’une des évidences de cet été ; ce God’s Country a beaucoup fait parler de lui (jusqu’à la distinction de “Meilleur premier album” par Pitchfork), et c’est amplement mérité. Des riffs au papier de verre, une basse qui te saute à la tronche, une batterie musclée qui t’envoie des patates de poivrot en boucle, une attitude punk et des paroles anticapitalistes si crues et directes que c’en est douloureux ; comment ne pas adorer, franchement ?
Ce qui fait le sel si particulier de Chat Pile – ou ce qui rend Chat Pile si salé, à vous de voir – c’est la profonde détresse qui vous prend à l’écoute. En partie grâce aux leads de guitare plaintifs mais surtout par la performance du chanteur Raygun Busch qui nous entraîne à travers la rage prolétaire des mineurs de l’Oklahoma, le désespoir complet, et jusqu’à la folie pure. Sans user d’aucun artifice ni effet de manche, Chat Pile est l’un des rares groupes qui font vraiment froid dans le dos.
Worhs – De Celles Qui Ne Crèveront Pas
Not your typical cis straight Black Metal – France
Worhs sont de retour, et c’est toujours les taulièr.e.s. N’en déplaise à certains, iels n’ont jamais rendu les armes en sortant plusieurs EPs de qualité depuis le très sombre Parmi les Bannis, la Confiance Règne de 2020.
Mais ce dernier album met la barre encore plus haut en élargissant encore leur spectre de couleurs musicales, et par conséquent leur palette d’émotions. Du Black Metal à la Shoegaze en passant par la Dream Pop et la Chanson Française, avec un chant de Willow bien plus clair et lyrique, De Celles Qui Ne Crèveront Pas est leur opus le moins claustrophobe et le plus lumineux. Un magnifique chant de désespoir, d’amour et de résistance. Still queer, still angry.
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Vile Haint – Sacrificial Baptism in Murky Waters
Southern Gothic-infused Black Metal, USA
Si vous ne connaissez pas le nom de Ryan Clackner… Eh bien, vous devriez. Ce prolifique et sémillant garçon est en train de se bâtir une solide réputation dans la scène US avec profusion de projets mêlant Black Metal et divers genres de musiques folk américaines : de la Country et de la Bluegrass avec le très remarqué Primeval Well, du Country Blues avec le récent Crestfallen Dusk, entre autres. Et en particulier, Vile Haint qui est probablement le projet le moins “clinquant”, présenté comme un mariage entre Black Metal et Southern Gothic à la Nick Cave.
Avec ce second album, les éléments de Southern Gothic ne sautent pas au visage d’entrée de jeu, mais se révèleront progressivement à l’auditeur consciencieux. Ils apportent un sous-texte discret mais omniprésent, des orientations pour les tons de guitare, ils réhaussent sans tapage l’ambiance d’un Black Metal crasseux, épique et terriblement efficace. Vile Haint montre que le succès de Ryan Clackner est moins dû aux gimmicks plus ou moins subtils, qu’à son talent pour forger des ambiances et des riffs mémorables pour nous narrer les vieilles histoires du Nouveau Monde.
Zola Jesus – Arkhon
Art Pop / Darkwave, USA
Nika Roza Danilova dispose d’un pédigrée musical que beaucoup envient mais n’atteindront jamais. Six albums, quatre EPs, moult collaborations, un univers sonore et visuel unique et une réputation si solide que des artistes comme Emma Ruth Rundle, Thou et Mizmor lui rendent hommage par une reprise, rien que ça.
Arkhon, réalisé avec le maître producteur Randall Dunn, est son album le plus ambitieux en date. La voix intense de Nika porte l’auditeur dans les immenses cavernes de la pochette, dans des sons spacieux de réverbération, de beats cristallins et de drones. Du dépouillement de Desire à la tension claustrophobe de Sewn ou à la danse mystique de The Fall, tout amateur de Metal devrait y prêter une oreille pour reprendre une perspective sur ce que peut signifier une musique intense et imposante.
Russian Circles – Gnosis
Post-Rock / Post-Metal – USA
Parfois on a juste besoin des vrais riffs. Et que le grand médiator me damne, Russian Circles ont tous les riffs. Tous ceux qui sont, ceux qui ont été, et ceux qui seront. Gnosis est un bonheur sonore, tout simplement.
NaN (Not a Number) – Euterpe
Cold Wave / Shoegaze – France
Dans l’océan infini de la Cold Wave aux obédiences Electro, NaN est l’une de ces rarissimes gouttes d’eau magiques qui s’empareront de votre coeur pour l’éternité. NaN possède tout ce qui faisait le génie de la Cold Wave des années 80 : les boîtes à rythme froides et saillantes, les synthés profonds aux saveurs de néons et les nappes de guitare qui relèvent le tout… Mais Bernard Collot (l’unique membre derrière le projet) agrandit cet héritage avec un son plus spacieux, plus lumineux, une écriture plus dynamique, et surtout sa superbe voix. Le résultat est là : une Cold Wave moderne remplie d’amour, de sensualité et d’espoirs. Absolument génial.
Wake – Thought Form Descent
Melodic Grindcore / Black-Death Metal, Canada
Le Grindcore mélodique, ça existe ? À cette question, WAKE répond oui. Ces sémillants garçons Albertains mêlent pour leur troisième album consécutif un fond de Grindcore avec des couches de Black/Death Metal. Au coeur des imposants arrangements de guitares, de la batterie lourde et métallique, et des structures progressives, Thought Form Descent retient la hargne, la dangerosité et la vélocité chaotique du Grind.
Aux antipodes géographiques de leurs confrères de Wormrot, WAKE montrent une autre façon d’entretenir un Grindcore frais et moderne, se montrant sans pitié avec les auditeurs indolents qui penseraient apprécier cet album à leur propre rythme.
Krallice – Psychagogue
Avant-Garde Synth Black Metal – USA
Bon, ben Krallice ont recommencé. Ils ont sorti un nouvel album, à peine six mois après le monumental Crystalline Exhaustion, et devinez quoi : ça tue tout, encore. Les titans New-Yorkais consolident cette nouvelle “distribution” depuis l’année dernière : les guitares sont désormais l’arme de choix de McMaster, Mick Barr est désormais appelé “Mick Basse” dans le milieu, et Colin Marston qui continue de cultiver sa nouvelle obsession pour les synthétiseurs pour continuer à raffiner et étendre cette nouvelle prééminence des claviers, initiée avec le très original Demonic Wealth.
Dans la lignée de Crystalline Exhaustion, la place des claviers est plus équilibrée que sur Demonic Wealth ; Krallice se redonnent un peu plus d’équilibre et encore plus d’espace pour développer leur chaos stellaire mathématique. Mais Psychagogue a une énergie et une rage Black Metal plus primale, qui explose littéralement dans ce cri monstrueux de Arrokoth Trireme.
Non seulement on n’arrête plus Krallice, mais ils évoluent encore plus vite que ce qu’on pensait. Que Dieu nous garde.