Artiste : Uriah Heep
Origine : Royaume-Uni
Date de sortie : 1972
Genre : Heavy Rock / Progressive Rock / Heavy Metal
Ceci est la version française. To read the English version, click here
Il y a des albums qui te donnent l’impression qu’ils ont toujours été là, peu importe à quel moment tu les rencontre.
Pour moi, Uriah Heep ça m’évoque un truc que je devrais trouver désuet, une vieillerie de brocante. Un vinyle poussiéreux extirpé d’un carton mal rangé du grenier, que tu mets dans la platine de papa juste comme ça pour voir, parce que la pochette est colorée.
Uriah Heep, c’est le vieux rock pour les connaisseurs un peu. Ce nom qui te dit vaguement quelque chose une fois qu’on t’a un peu expliqué, coincé au fond de la photo de famille derrière Hendrix, les Doors, Yes et surtout derrière le trio gagnant Led Zep – Purple – Sabbath. Autant Black Sabbath étaient conspués par la presse malgré leur succès parce qu’ils étaient « un truc de dégénérés », Uriah Heep arrivés même pas 2 ans plus tard ont été tout aussi conspués – malgré un succès tout aussi conséquent – parce que « ils imitent Black Sabbath »… Alors que rien ne saurait être plus faux. A la fois proche du côté « heavy » et électrique de Black Sab ou Led Zep, et proche du côté lyrique/claviers de Deep Purple, Uriah Heep sont en même temps bien démarqués de ces trois titans. Ils jouent dans leur propre catégorie, ils sont perchés dans leur univers musical, haut en couleurs.
Uriah Heep ont trouvé leur plus gros succès commercial et leur statut culte avec ce quatrième album, qui parachève la direction prise par le guitariste Mick Box qui maîtrise la wah-wah comme personne, le claviériste Ken Hensley et ses compositions lunaires, le pep’s du batteur Lee Kerslake, les lignes de basse mélodiques de Gary Thain et la voix multi-octave, quasi-opératique de David Byron. Et le mot qui me vient à l’esprit pour qualifier Demons & Wizards, résumer toute l’alchimie et l’alignement de planètes qui ont mené à ce résultat, c’est : « lumineux ».
Cet album transpire l’énergie qu’ils y ont mis, le plaisir qu’ils ont eu à composer et jouer tous ces morceaux, tous des classiques, tous différents et instantanément reconnaissables. Des premières mesures de The Wizard, chanson parfaite à chanter sous la douche, jusqu’au grand délire de The Spell, en passant par le rouleau-compresseur Easy Livin’, chacune de ces chansons est gravée dans l’inconscient collectif du Heavy Metal, et est aussi gravée dans le tien dès la première écoute.
S’ils sont aujourd’hui nettement plus oubliés du grand public que leurs confrères, il y a tellement de groupes et d’artistes qui leur doivent hommage – Blind Guardian, Queensrÿche, Dream Theater, Randy Rhoads, Queen, Ghost et j’en passe – qu’il est simplement faux de considérer qu’à l’origine du Metal était un Triumvirat. C’était un Carré d’As, les « Heep » étant l’As de Coeur.
Car c’est bien là que Demons & Wizards nous touche ; droit au coeur. C’est un album tour-à-tour mélancolique, drôle, jubilatoire, apaisant, kitsch et pétillant… Travelling in Time me donne toujours la pêche le matin, Circle of Hands me donne envie de chanter en chœur avec des amis autour d’un feu de camp, bras-dessus-bras-dessous. Ce disque, c’est un ami qui te réconforte, qui te donne le sourire et te dit que t’en fais pas, tout va bien se passer.
Je précise, je n’ai découvert Uriah Heep qu’à 30 ans – j’en ai 34 à la rédaction de ce pavé – mais tout dans cet album m’évoque des impressions bien plus anciennes, familières. Je l’ai écouté des milliers de fois et je l’écouterai encore sans jamais m’en lasser. Comme s’il avait toujours fait partie de moi.
Et j’espère qu’il fait aussi un peu partie de vous maintenant.