Artistes: Darkenhöld
Origine: France
Date de Sortie: Novembre 2020
Genre: Black Metal
Des ruines d’un Artefact puissant et fascinant, une Étoile nommée Aldebaran s’éleva dans le ciel du Black Metal français pour former une nouvelle constellation. Cet assemblage astral, constitué de Cervantes au chant et d’Aboth aux fûts, peut être observé par les plus expérimentés en matière d’Astronomie depuis 2008. De leur rayonnement dans les cieux sombres de l’Art Noir français, ont émané quatre splits et cinq albums, dont ce splendide joyau qui vient apporter un peu de magie à nos existences semi-confinées.
Quoi de mieux qu’une œuvre qui se veut, selon les aspirations de ses créateurs, un écho des fameux « Livres dont VOUS êtes le héros », pour s’évader d’une réalité morose et ennuyeuse et se glisser dans la peau d’un explorateur de donjons, de tours et bien sûr, d’arcanes et de sortilèges ? Quoi de mieux qu’un groupe de Black Metal qui assume tout, la mélodie, les synthés, les paroles en français et leur concept de Metal Noir Châtelain des Provinces du Sud, pour saisir une occasion de soutenir la scène française ? En attendant de les revoir sur scène, un spectacle fantastique que certains d’entre vous auront eu le plaisir de découvrir à Clisson, et que pour ma part j’ai eu la chance d’apprécier au Cernunnos Pagan Fest, pour les dix ans du groupe. Douze années désormais, et une discographie à la fois cohérente et variée, avec notamment des reprises qui en disent beaucoup: Abigor, Dimmu Borgir, Emperor, Enslaved… Des influences qui n’ont jamais été plus présentes que nécessaire, tout comme celle des premiers Opeth ou Diabolical Masquerade (beaucoup de ces influences étant celles d’Aldébaran, guitariste talentueux) . L’Art de Darkenhöld est bien plus clairement intégré à la scène BM que ne l’était celui d’Artefact, et de sa courte collection d’albums pourtant divins qui aurait pu nous laisser sur notre faim (Stellar Winds ou Fountain of the Enchanteress résonnent encore dans mon esprit) si une partie de l’esprit du groupe n’avait pas trouvé un nouveau véhicule pour finalement poursuivre et développer une œuvre plus prolifique.
Si les deux premiers albums posaient les fondations d’une forteresse sonore imprenable, si Castellum évoquait d’incessantes batailles et faisait la part belle au caractère épique de leur musique, si Memora Sylvarum nous emmenait dans des forêts mystérieuses, laissant même les accents heavy prendre parfois le dessus (de grands moments sur scène), que nous réserve cet opus ? Une œuvre tantôt glorieuse et guerrière, tantôt plus tempérée dans son approche, avec des passages permettant de respirer et de développer une ambiance variée, à l’aide d’une approche plus acoustique ou d’un interlude (La Tour de l’Alchimiste) ainsi que d’un outro (Dans le Cabinet de l’Archimage). Mais une œuvre toujours épique, et des structures variées au coeur même des différents morceaux de bravoure de l’album. Les claviers se font parfois très présents pour notre plus grand plaisir, des arrangements superbes qui donnent à l’excellente qualité sonore de l’ensemble et à la puissance de la section rythmique un impact démultiplié. Cervantes au micro nous ravit avec une performance excellente, tout comme les choeurs masculins sur Oriflamme, qui ouvre le bal sous la forme d’une composition majestueuse qui évoque à mon oreille sans doute trop enthousiaste Bedřich Smetana et la Moldau. On retrouve aussi des titres plus guerriers, comme l’Ost de la Forteresse, où des hurlements et une batterie puissante nous électrisent, tout comme un solo de guitare ou des percussions. Sur Incantations, comme sur Le Bestiaire Fantastique, la section rythmique écrase et secoue, et sur le second morceau le rendu est surpuissant et tendu comme la corde d’un archer défendant son château face des créatures effrayantes. Mon morceau préféré sera pour le moment Mystique de la Vouivre, où cette fois-ci mon amour d’Opeth me poussera à entendre une influence très Åkerfeldt dans un break tout à fait sublime et calme (propos gentiment démenti par Aldébaran car le morceau a été composé il y a trop longtemps pour subir l’influence d’Opeth).
En un mot comme en mille, je vous conseille chaudement de vous laisser tenter par cet opus, qui dépasse par bien des aspects les carcans du Black Metal, mais sait en rester respectueux afin de brasser large tant dans sa musique que dans le public qu’il pourrait atteindre. Il se peut que le groupe aspire un jour à plus d’expérimentations néanmoins, ou à développer et intensifier certains aspects de leur musique, comme les arrangements qui pourraient les faire basculer du côté BM Sympho de la Force. Le futur s’annonce excitant quoiqu’il en soit, et j’ai hâte d’accueillir la prochaine offrande, un rendez vous incontournable pour moi depuis une douzaine d’années !