ERRATUM : Dans la version originale de cet article publié le 10 septembre 2021, j’affirmais que Snorre n’avait pas spécialement été très impliqué dans le processus de composition de De Mysteriis Dom. Sathanas. Je me suis lourdement trompé, me basant sur une interview de Snorre où il a lui-même beaucoup minimisé le rôle qu’il a joué (il venait de sortir de prison et la polémique cicatrisait à peine). Dans une édition collector de l’album sortie en 2019, le livret fait état du rôle important que Snorre a eu dans la création de ce chef-d’oeuvre. Merci à Camille (Dreams of the Drowned) pour m’avoir apporté ces précisions qui changent complètement la perspective.
En 1992 les membres de l’époque de Thorns, sont enfin tous réunis à Oslo. Mais en six mois, ils n’ont jamais réussi à trouver un endroit pour répéter. Bård, le batteur, a déjà rejoint Emperor pour devenir Faust, et le travail de Snorre sur les compositions et le son de guitare lui vaut d’être embauché par un certain Øystein Aarseth en 1992, comme second guitariste pour Mayhem. Il met donc Thorns en hiatus pour se consacrer à ce dream job. La carrière c’est important.
Ironie du sort, Snorre n’est pas crédité officiellement sur l’album.
Mais réduire son statut à un simple filler, un musicien de session, serait occulter l’influence déterminante et déclarée que le jeu de Snorre a eu sur Euronymous. On attribue souvent à Øystein cette façon de faire chouiner les guitares sur des dissonances aigues et la composition de riffs tortueux, mais c’est en écoutant le travail de Snorre qu’Euronymous a poussé dans cette direction. Ce riffing en tremolo pick qui hurle aujourd’hui « Black Metal Norvégien » aux oreilles de millions de métalleux a été développé par Snorre.
Ça s’entend particulièrement la cette chanson From The Dark Past, dont le riff principal n’est ni plus ni moins qu’un recyclage de Lovely Children de Thorns. Snorre aurait dit que de toute façon il aurait jeté cette chanson à la poubelle, autant la recycler. Ecoutez plutôt la ressemblance :
Le mec, bon prince, file des riffs gratos à Euronymous pour composer son Magnum Opus, voire le Magnum Opus de toute la seconde vague. Chad move.
Pendant très longtemps, cela a été la version officielle des choses : Snorre a influencé et filé quelques riffs à Euronymous. Il s’avère en fait que les parties de guitare de l’album ont bien été co-composées par Euronymous et Snorre, ce qui pose question sur l’intégrité d’Euronymous de n’avoir crédité Snorre nulle part.
Snorre lui-même a souvent minimisé son rôle, soit par modestie ou par pudeur, soit pour éviter d’être trop associé à l’odeur de soufre qui se dégage de De Mysteriis Dom. Sathanas. De par le meurtre d’Euronymous évidemment, mais aussi de par la polémique qui a suivi, Hellhammer (le batteur) ayant fait publier l’album sur lequel jouent le meurtrier (Varg à la basse) et la victime (Euronymous), et ce contre l’avis de la famille du défunt.
Sachant l’implication malheureuse que Snorre a eu dans tout cela – et dont on reparlera bientôt – il n’est pas étonnant qu’il ait tenu à se distancier. Ce qui en fait sans doute l’un de ceux avec le plus de jugeote de toute cette petite bande.
Il n’en demeure pas moins qu’il est l’un des architectes de cet album qui a marqué l’histoire et la musique au fer noir. Il s’en est fallu de peu pour que ce soit son dernier coup d’éclat musical, mais le destin est venu le chercher une fois de plus…
La suite au prochain épisode.