Artiste : Pat Travers
Origine : Canada
Date de sortie : 1978
Genre : hard rock, heavy metal, blues rock, funk rock
Note : 9,5/10
Fort de trois albums de grande qualité, Pat Travers est vite parvenu à se faire un nom au Canada puis aux États-Unis. Il faut dire que le style hard/heavy incisif teinté de jazz, de funk voire de rock prog avait tout pour séduire, surtout avec un jeu de guitare aussi puissant et élégant que celui de Pat, bien soutenu par son virevoltant bassiste Peter Mars Cowling et un certain Nicko McBrain à la batterie, qu’on retrouverait 5 ans plus tard chez Iron Maiden. Fin 1977, Nicko retourne en Europe et se voit remplacer par Tommy Aldridge, artificier prodige officiant alors chez Black Oak Arkansas. Avec la venue d’un second guitariste en la personne de Pat Thrall, c’est un Pat Travers Band nouveau qui entre en studio début 1978 pour enregistrer Heat In The Street, qui sortira plus tard la même année.
Le morceau-titre et ses riffs fracassants ne laissent aucun doute, c’est reparti pour une leçon de hard groovy, en plus d’être un guitariste de génie (quel solo!) , Pat chante admirablement bien tandis que sa section rythmique est de nouveau très affûtée. Et ce n’est que le début, car Killer’s Instinct réserve une baffe encore plus monumentale. Mid-tempo au groove irrésistible, pétri de riffs assassins et doté d’une hargne ravageuse, ce titre dévaste tout sur son passage et s’impose comme l’un des sommets discografiques de la carrière de Pat, un pur missile d’une puissance qu’il n’avait jamais atteint jusqu’alors. Et que dire de l’instrumentale Hammerhead, cette fois le tempo s’accélère, cognant à la porte du speed metal, Aldridge envoit la sauce et les riffs s’enchaînent avec une verve incroyable. Comme sur les albums précédents, on retrouve également cette extatique copulation entre hard rock et funk avec le monumental Go All Night, une véritable décharge de groove aussi dansante que fracassante, à ranger auprès des Hooked On Music, Gettin’ Betta et autres Off Beat Ride.
Mais Heat In The Street ne fait pas que distribuer les mandales, Pat y développe sa face plus mélodique déjà audible sur les précédents disques. Ainsi I Tried To Believe chatouille délicatement les oreilles avec ses mélodies Rush-esques (la mélodie principale rappelle un peu Fly By Night), la voix et le jeu de Pat se font plus doux et touchants, une pure merveille. Et que dire du magistral duo Prelude/One For Me And One For You, cette fois le groupe adopte un style plus nettement progressif, enrichi des nappes de synthétiseur de Pat Thrall, et le résultat est tout simplement exceptionnel! Les mélodies sont toutes plus inspirées les unes que les autres, l’exécution parfaite grâce notamment à une remarquable complémentarité guitare-basse-clavier, et on décèle déjà des sonorités reggae-isantes qui seront d’avantage exploitées sur Crash And Burn deux ans plus tard, une véritable démonstration de classe dont on savoure chaque seconde. Au milieu de ce festival, le groupe rend hommage au légendaire tube hard rock australiens de Stevie Wright, Evie (écrit par Harry Vanda et George Young les futurs producteurs d’AC/DC), un titre déjà excellent que Pat et sa bande ont parfaitement su adapter à leur univers et à leur groove unique.
C’est donc bien un authentique chef d’oeuvre que le Pat Travers Band nous livre en cette glorieuse année 1978. Terriblement incisif dans ses moments métalliques, Heat In The Street se montre également d’une remarquable élégance dans ses moments plus doux, offrant ainsi une incroyable palette de sonorités magistralement distillées par des musiciens au talent individuel hors du commun. Ce quatrième album marque par ailleurs le début d’un certain âge d’or pour le groupe, qui enchainera avec un Live Go For What You Know légendaire et un cinquième album studio, Crash And Burn, explorant d’avantage la face prog aspergée de reggae de One For Me And One For You, tout en gardant de la place pour les tueries heavy groove.