L’album du jour sera Witness, œuvre fantastique des Danois de Vola. Sorti il y a un peu plus de deux mois, le 21 Mai 2021 pour être exact. Une chronique inhabituelle pour moi, n’ayant eu que peu d’attirance pour le prog moderne depuis de nombreuses années. Vola, dont le nom vient du latin selon le groupe mais qui n’a pas le sens escompté (cela signifierait « mouche » et pas quelque chose d’aussi poétique que ce que les membres répondent en interview), m’a pourtant attiré dans un monde merveilleux de guitares accordées bas, voire dotées d’une septième corde (mais pour quoi faire, voyons?), de vocalistes fascinants mais pas tous de la même manière et de compos travaillées et ambitieuses bien que chacune à leur façon . Leprous, Soen ou Pain of Salvation ont commencé à occuper un espace considérable dans mon temps d’écoute et je dois dire que je me régale.
Mais Julien et Vola… c’est une histoire particulière (et pas l’arrière petit fils du philosophe coqueluche de l’extrême-droite). Cet album me hante, j’entends par là que les mélodies, les riffs sont de vrais « earworms » qui creusent sans cesse dans mon cerveau pour se faire un petit terrier jusqu’en Décembre 2021, quand le couperet tombera pour donner nos préférences.
L’étiquette Djent a été apposée à leur musique par le passé et sans doute en reste-t-il la lourdeur et les riffs très graves, qui bercent et secouent l’auditeur, soulignant avec goût le travail mélodique insensé des musiciens et les harmonies divines du chanteur, associés au jeu de claviers de Martin Werner, qui fait des merveilles. Asger Mygind, le vocaliste, ne possède pas le plus puissant organe qui soit, mais a un charisme indéniable, une identité claire et facilement reconnaissable. Sa voix est faîte pour ses compos, ou ses compos sont faîtes pour sa voix, au choix. Les chansons présentes sur ce Witness sont des tubes en puissance, en témoigne le premier parmi tant d’autres, l’imparable « Straight Lines ». Des tubes sombres, recherchés, des tubes beaucoup plus complexes qu’il n’y parait, infiniment plus techniques que ce qu’ils révèlent la première fois que les refrains majestueux viennent nous emporter vers une douce rêverie nostalgique. Car Adam Janzi, le batteur du groupe est lui aussi merveilleusement au point derrière ses fûts, aussi carré et dévastateur que créatif et inspiré. Sur un morceau comme « 24 Light-Years » qu’il a désigné comme son favori de l’album et qui a été composé à partir d’un groove qu’il a composé à la batterie, Vola impressionne au plus haut niveau. Tout y est délicat, comme en suspens, les cymbales donnent l’impression d’une hésitation, d’une fébrilité alors que le morceau offre une réelle progression jusqu’à un riff qui vient comme pour rassurer l’auditeur après toutes ces émotions empreintes d’accents jazzy. Intense, classieux, mémorable… Vola le sera à chaque piste, sans se relâcher.
Ils invitent le rappeur SHAHMEN sur « These Black Claws », et créent un morceau hypnotique entre électro, slam et ce riff énorme, avec les claviers qui résonnent comme des cloches dans le lointain. « Future Bird » débute avec une majesté telle qu’on imaginerait presque le morceau en version symphonique révélant un aspect glorieux dans ces minutes emplies de beauté. Les couplets sont eux beaucoup plus jazzy, ce qui crée un contraste fascinant. « Napalm » est avec « Straight Lines », l’autre tube de l’album, marquant et maîtrisé, avec ces discrets chœurs fantomatiques. Cette ambiance sombre et onirique est d’ailleurs une des grandes forces de l’album et ce son fantastique que l’on doit à Jacob Hansen (membre de Pyramaze) y est pour beaucoup, le groupe a bien fait de laisser les manettes à quelqu’un d’extérieur au groupe pour la première fois. Ce son fait aussi merveille sur « Stone Leader Falling Down », la pièce la plus lourde et la plus puissante de l’album, avec quelques vocaux plus extrêmes pour appuyer le refrain. Toute cette richesse et cette variété subtilement dissimulée dans un album pourtant d’une cohérence impressionnante en font une expérience riche et excitante, dont je ne me lasse pas pour le moment.
C’est une œuvre travaillée, personnelle, une œuvre qui demande un nombre d’écoute conséquent avant de révéler toute sa richesse, pour peu que vous ayez aperçu l’entrée de la caverne au trésor à la première écoute… Fiez-vous aux refrains accrocheurs et aux riffs dévastateurs !
[…] est venu ravir mes oreilles pour la première fois. Je les ai donc naturellement placés au sommet, les ayant chroniqués, écoutés, adorés, promus… Leprous, que j’ai enfin découverts cette année, m’ont tout à fait convaincu […]