When Johnny Comes Marching Home
De musique anti-guerre à la musique militaire
(Cette article est la seconde partie d’une série en trois parties, vous trouverez la première partie ici )
La dernière fois, je vous ai laissé avec les travaux de Jonathan E. Lighter, confirmant la paternité de Joseph B. Geoghegan sur le morceau Johnny I Hardly Knew Ye, chanson de music hall anglais des années 1860s.
Pourtant, certaines légendes voudraient que Johnny I Hardly Knew Ye soit l’inspiration principal du célèbre chanson When Johnny Comes Marching Home, écrite par Patrick Gilmore, musicien américain d’origine irlandaise pendant la guerre de sécession, thèse que Jonathan E. Lighter a lui même réfuté dans le même ouvrage, en expliquant que l’air de la musique des deux morceaux ne sont pas similaires. Pourtant, à l’écoute…
L’histoire semble aussi confirmer le fait que When Johnny Comes Marching Home ne soit pas une inspiration de Johnny I Hardly Knew Ye puisque ce dernier a été composé en 1867 et la publication des partitions du premier au Bibliothèque du Congrès date du 26 Septembre 1863 sous le pseudonyme Louis Lambert (surement pour donner une touche de romantisme aux compositions comme c’était la mode à l’époque), soit 4 ans avant! Alors comment?
Interrogeons donc Patrick Gilmore! Il racontait avoir écrit cette chanson pour sa soeur quand il voit cette dernière prier chaque jour pour le retour sain et sauf de son fiancé, le capitaine John O’Rourke de la batterie des artilleries légères de l’armée de l’Union. Il reconnaît, par contre, que la musique n’est pas composée par lui mais basée sur un air qu’il a entendu chantonner par quelqu’un pendant les premiers jours des rébellions.
Cette mélodie a été publiée dans les environs du 1er Juillet 1863 sous l’intitulé Johnny Fill Up the Bowl, une chanson de taverne pendant la guerre de sécession.
C’est là que les travaux de Francis O’Neill, un officier de police d’origine irlandaise et auteur d’une série de plusieurs ouvrages sur les chansons folks et traditionnelles irlandaises et gaéliques, notamment la série Waifs and Strays of Gaelic Melody 1922, No. 69, et de Herbert Hughes, musicien compositeur irlandais et collecteurs de musique traditionnelle irlandaise, dans son Irish Country Songs (London 1934), vont nous être utiles! Leurs travaux de recherche ont permis de remonter à l’origine folk de Johnny I Hardly Knew Ye. Cette chanson date probablement de 1802, pendant la période où les régiments irlandais étaient recrutés massivement pour servir sur les champs de bataille à l’Est de l’Inde.
Qui est l’oeuf, qui est la poule? Nous ne le savons pas vraiment. Ces même chercheurs ne l’affirment pas, mais ils suggèrent une survivance de cette chanson folk irlandaise qui a conquis le nord de l’Angleterre, puis parti aux U.S. avec les vagues migratoires. Une chanson folk, devenu chanson anti-guerre, puis chantée dans les tavernes par les soldats d’origine irlandaise. La mélodie arrivant aux oreilles de Gilmore, et avec les circonstances, se transforme en une ode à la bravoure, la joie de retrouver un soldat victorieux après la guerre.
Le succès de When Johnny Comes Marching Home était tel qu’elle est devenue une chanson incontournable dans le registre des musiques militaires des Etats-Unis, ce morceau sera très souvent joué par les orchestres et chœurs de l’armée.
Puisque c’est un incontournable du répertoire de musique militaire, je vous propose de la découvrir d’abord avec la performance du West Point Band, ou United States Military Academy Band. C’est sa version instrumentale.
Enchaînons avec cette version très joyeuse des soeurs Andrews The Andrews Sisters, trio de chanteuse Jazz, très célèbre pendant les années 40s. Ce son et cet air jazzy sont tellement typique de l’époque.
Restons donc sur les années 40 avec cette interprétation de Glenn Miller et son orchestre jazz&swing. Une version vintage de toute beauté, bien loin des sons martiaux des cuivres du West Point Band.
Retournons donc vers les sonorités plus militaire avec un autre Miller, Mitch de son prénom, musicien, chanteur, chef de chœur et producteur de musique américain. Jolie interprétation avec son chœur de chanteurs.
Découvrons donc ce morceau tel qu’il serait joué à l’époque avec 2nd South Carolina String Band, un groupe de musique de reconstitution de la guerre de sécession, ils essaient de recréer la musique populaire américaine des années 1820 à 1860 avec des instruments authentiques et dans un style d’époque.
Découvrons ce morceau à travers la jolie voix de la 8ème meilleure actrice de la légende du cinéma américaine, Judy Garland. C’est aussi joli qu’une musique jouée par l’orchestre de Disney.
Ce morceau sous les notes de funk, soul et doo-wop devient encore plus joyeux et festif. Les excellentes Pattie Labelle And The Bluebells!
Comment ce morceau sonne quand c’est Dolly Parton, cette méga-star de la country s’empare du morceau? Je vous laisse découvrir avec ce live pailleté!
Et puisque les origines irlandaises de ce morceau sont souvent revendiquées (et même prouvée peut-on le dire décemment), c’est normal qu’un musicien irlandais s’y colle. Voici Derek Warfield, chanteur, auteur-compositeur et ancien membre du groupe The Wolfe Tones.
Superbe version qui met vraiment en avant les origines irlandaise de la mélodie!
Et comme les musiciens de la scène punk/rock/metal ne sont jamais très loin quand on parle de chansons folk ou dérivés des chansons contestataires, voici la version proposé par le groupe de punk suédois Ultima Thule!
Une petite version soul blues? Voici The Sheppards, du dark soul rock&rollesque de Chicago.
Et parce que le charme de l’instrumental est toujours irrésistible, je vous livre ici l’interprétation du groupe de blues/hard rock de Long Island, Mountain!
Toujours dans l’instrumental, voici le magnifique et hypnotique piano jazz de Jimmy Smith.
Et comment ça donnerait avec un orchestre mambo? The king of Mambo, Perez Prado, compositeur et chef d’orchestre Cubain s’y est collé. Rafraîchissant!
Le plus surprenant pour la fin, j’appelle Toots Sweet un musicien New Yorkais officiant dans un registre urban rock funk. Il livre une version résolument punk et moderne de cette chanson.