I. 1. Bruce Springsteen – Darkness On The Edge Of Town

Acte I: Blues rock, heartland rock

Album 1 : Darkness On The Edge Of Town

Artiste : Bruce Springsteen

Origine : New Jersey, États-Unis

Pour ceux qui ne seraient pas familiers avec le terme « heartland rock », il s’agit de cette forme de rock puisant dans le blues, la folk, la country et la soul, et dont les paroles mettent généralement en scène des personnages issus des classes populaires, leurs difficultés socio-économiques et le courage dont ils et elles font preuve pour les surmonter. On peut difficilement dater son apparition mais on trouve à ses origines Bob Dylan, les Byrds, Van Morrison ou Bob Seger à la fin 60-début 70, avant que ne survienne l’étoile Bruce Springsteen qui reste encore aujourd’hui celui qui incarne le mieux ce genre musical. Certes, le boss avait déjà posé beaucoup de base sur l’album qui l’a fait connaitre, Born To Run, en 1975, mais aussi prodigieux qu’il pouvait être, ce disque était encore trop juvénile et pas assez dramatique et poignant pour réellement chanter la souffrance des classes défavorisées. 3 ans et un paquet d’ennuis judiciaires avec son ancien producteur plus tard, Bruce Springsteen signe le manifeste ultime de ce que sera le heartland rock dans la décennie suivante, aussi bien pour lui que pour ceux qui s’en sont inspirés, l’extraordinaire Darkness On The Edge Of Town!

Le titre résume en lui-même le contenu de l’album et l’esprit de ce stile, l’obscurité aux abords de la ville, c’est à dire les banlieues, où la crise économique a amené chomage et morosité chez des populations déjà fragiles. Aussi bien dans les textes que dans la musique, la légèreté de Born To Run cède sa place à une dureté plutôt inédite à ce moment dans la carrière de Springsteen, dureté qui se manifeste autant dans des morceaux aux portes du hard rock comme Adam Raised A Cain, Candy’s Room ou Streets Of Fire que sur ceux plus calmes mais très sombres comme Factory ou le splendide Racing In The Street qui reste à ce jour l’un des plus grands bijous de tout le répertoire du boss! Certes on trouve tout de même des morceaux plus enjoués, comme Badlands, Prove It All Night ou l’incontournable classique The Promised Land et sa légendaire mélodie d’harmonica, mais même dans ces moments de lumière la détresse des personnages incarnés par Bruce reste palpable, et cette légèreté leur sert surtout d’exutoire, pour se redonner du courage malgré la dureté de leur vie.

On comprend donc que même si l’émergence du heartland rock est plus le résultat d’un processus long de 10 ans qu’un fénomène soudain, Darkness On The Edge Of Town a clairement marqué un tournant et fait basculer ce genre musical vers ses côtés plus dramatiques qui en feront l’une des principales caractéristiques, même si le côté plus imnesque et glorieux hérité de Born To Run restera également un trait essentiel. Mais aussi crucial et génial qu’il soit, ce disque n’est évidemment pas le seul à avoir contribué à définir le heartland rock des années 80, d’autres ont joué un role prépondérant et c’est ce qu’on verra dans les prochaines semaines!