I. 6. Whitesnake – Trouble

Acte I: Blues rock, heartland rock

Album 6 : Trouble

Artiste : Whitesnake

Origine : Angleterre

Pour ce 6ème et dernier album de l’acte I, on part en territoire blues plus musclés avec le premier album de l’une des formations les plus marquantes de cette période, Whitesnake. L’histoire du groupe est forcément intimement liée avec celle de la carrière solo de David Coverdale, qui depuis son départ de Deep Purple en 1976 a signé deux excellents disques, White Snake en 1977 et Northwinds en 1978. À la recherche d’un groupe stable, Coverdale fonde Whitesnake (du nom de son premier disque solo) début 1978 soit peu de temps après la sortie de Northwinds, en compagnie de son guitariste Micky Moody, déjà présent sur ses deux albums solo, ainsi que Bernie Marsden (guitare), Neil Murray (basse) et Dave Dowle (batterie), le poste de claviériste étant encore instable. Sous la houlette du légendaire producteur Martin Birch, la bande fait forte impression dès son premier EP Snakebite en juin 1978, avant d’enregistrer un renfort de poids en la personne de l’ex-claviériste de Deep Purple, Jon Lord. L’été qui suit est consacré à l’enregistrement du premier vrai album du groupe, qui sort en octobre 1978 sous le nom de Trouble.

On retrouve dans ce disque la palette sonore des premiers disques solo de Coverdale, allant du hard rock à la soul en passant par la funk, le jazz fusion ou même le heavy metal, toutes les nuances possibles du blues sont balayés, et c’est bien ce qui fait sa grandeur! Take Me With You ouvre les hostilités de façon lumineuse en combinant les ébauches speed metal de Deep Purple à des mélodies plus jazzy et épiques, un véritable bijou qui vient se loger direct parmi les moments les plus glorieux de la carrière de Coverdale! Et c’est loin d’être un coup d’éclat isolé, on retrouve cette agression métallique mêlée à une complexité très jazz fusion sur l’incroyable Nighthawk et le plus soul Free Flight, dont les plans de batterie ultra groovy et les riffs de feu en mettent plein la vue, à en regretter que le groupe ne soit connu du grand public que par ses tubes FM. Mais puisqu’on parle de FM, l’album n’est tout de même pas dénué de morceaux à l’accroche plus immédiate et à la sensualité irrésistible tels The Time Is Right For Love et son refrain à chanter à tue-tête ou le tout aussi chaleureux Love To Keep You Warm, des morceaux qui n’auraient pas fait tache dans un album du Mark III de Deep Purple.

Doté d’une grande richesse musicale et sublimé par des compositions de rêve, Trouble est incontestablement à ranger parmi les disques les plus gigantesques de cette fin de décennie. Si aujourd’hui le nom de Whitesnake est quasi-instantanément associé aux années 80, c’est bien de 1978 que datent ses débuts, dans un registre plus ambitieux que quasiment tout ce qui suivra. Loin des changements constants de personnel d’après 1984, Whitesnake est à l’époque un groupe à part entière, doté d’une véritable cohésion, et où chaque musicien exprime pleinement toutes les facettes de son talent, tout en rendant sa musique irrésistiblement charmeuse, la perfection comme peu sont capables de l’atteindre! Et c’est probablement cette perfection qui fera du suivant Lovehunter (1979) une demi-déception malgré ses immenses qualités, difficile de passer après un tel monument, même si Whitesnake réussira finalement à égaler son fait d’arme en 1980 avec son magistral troisième album Ready An’ Willing.